Le vélo, nouvel ennemi des centres-villes
Récemment, Lille et d’autres grandes villes françaises ont choisi de limiter la circulation des vélos dans certaines zones. Une volonté de protéger les piétons qui prend le problème à l’envers.
En bref :
- En octobre, Lille a restreint la circulation des vélos en zones piétonnes, imposant des amendes pour non-conformité.
- Pour Reporterre, ces décisions vont à l’encontre des enjeux actuels.
- Thibault Quéré de la FUB souligne que ces interdictions rendent le vélo moins attractif. L’accent devrait être mis sur des infrastructures adaptées et l’éducation plutôt que sur l’interdiction.
Début octobre, la municipalité socialiste de Lille a publié un arrêté visant à restreindre la circulation des vélos dans les zones piétonnes du centre-ville, de 11h à 22h. Les cyclistes sont invités à mettre pied à terre, sous peine d’être sanctionnés d’une amende de 35 à 135 €. Des arrêtés similaires ont été pris par les villes d’Agen, Nice ou Niort.
Pour Reporterre, ces décisions vont à l’encontre des enjeux que nous affrontons (et nous les rejoignons). Certes, pour un piéton, en zone piétonne de surcroit, se faire frôler par un engin silencieux comme un vélo est tout sauf agréable. Néanmoins, le manque de civilité de certains ne devrait pas masquer l’inadaptation de certains centres-ville aux nouvelles mobilités.
Ne pas décourager l’usage du vélo
Thibault Quéré, membre de la Fédération française des usagers de la bicyclette (FUB), cité par Reporterre, pointe le fait que de telles décisions rendent le vélo moins attractif. Il cite l’exemple de Lille, où un cycliste peut perdre une quinzaine de minutes à devoir marcher à côté de son vélo s’il se rend ou travers les zones d’interdiction. De même, les riverains habitant les zones limitées et se déplaçant à vélo sont eux aussi pénalisés.
Thibault Quéré poursuit en pointant du doigt la faible surface des zones sans voitures et donc la grande concentration de piétons et cyclistes. Le réseau cyclable doit, selon le représentant de la FUB, permettre aux cyclistes de se rendre dans les centres-ville, mais également de les contourner pour les désengorger.
Une accidentalité moins élevée
Surtout, faire passer les cyclistes pour de terribles dangers pour les piétons est abusif. Sur les 488 piétons morts en 2022, seul 1 l’a été dans une collision avec un vélo. L’écrasante majorité des décès de piétons est du fait de conducteurs de voitures, poids lourds, bus, motos…
Plutôt que d’interdire les vélos, il parait donc plus important de favoriser des infrastructures adaptées à la cohabitation entre piétons et cyclistes. D’autant qu’en zone piétonne, le Code de la route prévoit déjà « une circulation au pas » pour les vélos. Le non-respect de ces règles devrait mener à une plus grande part de formation et de pédagogie. La FUB défend une « éducation à la mobilité à vélo à tous les âges, portée par les vélo-écoles. »
Bannir un moyen de transport doux, moins polluant, moins mortel et bon pour la santé ne peut pas être une réponse. Ce genre de décision est totalement à contre-courant quand le dernier baromètre de Vélo et territoires indique une hausse de 7 % des trajets à vélo en zone urbaine sur les 3 premiers trimestres en 2023.
- Publié le 21 octobre 2023