Vélo et société

Vélo Île-De-France et Métropole du Grand Paris : des plans vélos aux avancées contrastées

Dans le jargon, on les appelle VIF et MGP. Ces plans regroupent l’ensemble des projets devant transformer le réseau cyclable en région Île-De-France, à l’horizon des JO de Paris 2024, mais également au-delà. Où en est-on ?

© Unsplash – Markus Spiske

En bref :

  • Les projets visant à améliorer sensiblement le réseau cyclable protégé en Île-De-France sont nombreux et ambitieux.
  • Malgré des enveloppes conséquentes, les délais peinent à être tenus et il demeure de nombreux tronçons oubliés ou donnant lieu à des blocages.
  • Si les JO de Paris 2024 sont utilisés comme un accélérateur, il ne faudra absolument pas que la pression retombe une fois l’événement passé pour tenir des engagements nécessaires au développement du vélo dans la région.

Où en est le réseau Vélo Île-De-France (VIF) qui doit, à terme, relier les grands pôles de la région et Paris à travers 11 lignes et 750 km de voies cyclables continues et sécurisées ? C’est une question qui se pose fréquemment depuis sa mise en chantier en 2020.

Supervisé par le Collectif Vélo Île-De-France mais porté et financé par la Région, il devrait – selon le calendrier initial – être livré à moitié d’ici 2025 (avant l’ouverture d’une deuxième phase jusqu’en 2030). Or si des portions cyclables émergent et que des contrats sont régulièrement signés, la carte interactive du Collectif présentant l’avancée des travaux permet de mieux cerner les points d’inquiétude.

Le réseau VIF en retard

Dans un communiqué imposant un nouveau point d’étape, le Collectif – regroupant 44 associations locales – présente l’état de son observatoire et ne cache pas son pessimisme. « A ce jour, près de la moitié du VIF reste à réaliser » écrit-il avant d’ajouter : « Pour qu’il se concrétise, l’engagement de la Région ne suffit plus ». Sous-entendu, il faut absolument que les collectivités locales se réveillent et avancent sur le sujet, en faisant du dossier vélo une priorité.

En chiffres, 44% de la phase 1 du réseau reste à débloquer. Le préexistant représente 39% de l’objectif, les travaux livrés 7%, les travaux en cours (ou signés) 10%. Il reste 29% de projets à l’étude, 7% de tronçons sans aucun projet et 8% de projets bloqués.

Paris et la Seine-Saint-Denis font figure de bons élèves. Elles bénéficient de voies préexistantes nombreuses et sont le terrain de travaux en cours, voire déjà livrés. Dans les Hauts-De-Seine, la situation est également plutôt satisfaisante, malgré deux tronçons importants toujours à l’étude (Sèvres/Chaville et Issy-Les-Moulineaux).

Sachant en plus que les Hauts-De-Seine vont, à côté de ça, bénéficier du plan vélo des 11 communes de Vallée Sud Grand Paris qui doit permettre la création de 78 km de pistes cyclables et la remise en état de 55 km existants, portant le réseau à 250 km. 7000 places de stationnement vélos doivent également y voir le jour.

Blocages et tronçons sans projets

Pour en revenir au VIF, les points de blocage cristallisent l’attention du Collectif, représentant des exemples concrets des difficultés à faire bouger certaines municipalités et communautés de communes sur des tronçons pourtant essentiels.

On pourrait citer la ville de Fontenay-Aux-Roses qui s’oppose à l’aménagement de la RD63 qui relie Sceaux et Châtillon ; la fermeté du maire de Versailles qui ne veut pas transformer les bandes cyclables de l’avenue de Paris en pistes, ce qui obligerait à modifier le stationnement automobile ; Saint-Quentin-En-Yvelines qui veut imposer des voies vertes sur trottoirs auxquelles s’opposent le Collectif et l’association locale ; la fermeture de coronapistes non pérennisées à Créteil ou l’immobilisme local sur un tronçon stratégique à Nogent-Sur-Marne.

Egalement inquiétants, les tronçons qui n’en sont qu’à un stade d’étude, voire pire, sans projet connu. Or, si l’on en croit l’expérience du Collectif, il faut au mieux une année pour mettre en place un aménagement cyclable. Dans la plupart des cas, cela prend davantage de temps. Certains projets nécessitent jusqu’à cinq années entre leur mise à l’étude et leur inauguration. C’est ce qui fait dire au Collectif que les délais ne seront pas tenus, et ce malgré le coup d’accélérateur indéniable que sont les Jeux Olympiques.

Pour autant, rien n’est totalement perdu car – la période Covid nous l’a montré – des solutions transitoires et efficaces peuvent être rapidement mises en place lorsqu’il existe une volonté politique et une demande de la population. Réfléchir aux plans de circulation et réaliser des aménagements à pérenniser par la suite peut être envisagé à court terme.

215 km de pistes en vue pour la MGP

S’il y a le VIF, il faut aussi compter avec la MGP pour doper les infrastructures cyclables en Île-De-France. MGP pour Métropole du Grand Paris, qui représente en ensemble de 131 communes ayant lancé, en 2021, un grand plan cyclable. La MGP regroupe ainsi Paris et toutes les villes de la petite couronne, ainsi qu’une poignée de villes de la grande couronne parisienne.

Forte d’une enveloppe initiale de 108 millions d’euros, portée depuis à 116 millions, la MGP a prévu la pérennisation, rénovation et construction de 9 grands axes cyclables traversant la région, sur 215 km de pistes. Un projet ambitieux qui, là encore, prend du temps pour se concrétiser.

En effet, si 31 projets représentant un budget de 14,7 millions d’euros ont d’ores et déjà été engagés, seuls 9 km de pistes cyclables ont – à ce jour – été mis en service. 11 km supplémentaires sont en travaux, et 16 km de plus sont financés. Mis bout à bout, ces projets votés, commencés et terminés représentent 36 kilomètres. Là encore, il va falloir accélérer.

Heureusement, les voies existantes permettent à la MGP d’afficher un chiffre plus optimiste : 58% des aménagements de ce réseau sont déjà réalisés ou engagés. Et l’ensemble de rappeler que l’accompagnement est prévu pour s’étaler sur 10 ans, jusqu’en 2031.

Pour l’heure, la Métropole du Grand Paris ne semble pourtant n’avoir qu’un objectif en tête : les JO de Paris 2024. 2 millions d’euros de financements spéciaux ont été attribués aux « Olympistes » et 665 000 euros doivent permettre la création de stationnements cyclables pérennes à proximité des sites olympiques. 400 000 euros vont, pour leur part, être investis de sorte à épauler l’effort de la municipalité afin de créer des stations Velib’ éphémères et mettre en place de nouveaux vélos partagés.

Ephémère mais pas perdus, insistent les responsables. En effet, tout ce qui sera créé pour le vélo à destination des JO sans avoir vocation à rester en place devra être démonté et réutilisé. Ce seront le cas de 20 000 places de stationnement (essentiellement des arceaux pour sécuriser les vélos), qui devront être confiés ensuite aux collectivités. Elles auront la tâche de leur trouver des emplacements définitifs.

Un véritable enjeu politique

Une chose est certaine, les aménagements cyclables continus et sécurisés sont de véritables accélérateurs de la pratique du vélo, puisque le manque de sécurité au guidon reste le premier frein à l’adoption chez la population, devant le risque de vol.

Le vélo (et plus globalement les mobilités actives) étant un outil très important pour répondre aux grands défis de notre époque (écologie, urbanisme, économie, santé publique, etc.), il est primordial que ces plans vélos se multiplient et aboutissent dans les temps.

Le temps étant compté, l’un des moyens d’action est encore de s’intéresser aux projets (nécessaires ou envisagés) autour de chez soi, en se rapprochant des municipalités et collectivités que les demandes répétées de la population peuvent faire bouger. Aussi nous ne pouvons qu’encourager les cyclistes à se regrouper en collectifs, à organiser des pétitions, et à faire connaître leurs besoins en infrastructures dédiées et sécurisantes.

Cela nous fait, d’ailleurs, penser à l’initiative de nos confrères de Weelz! qui, en novembre dernier, lançaient le projet « Gamin, réclame ta piste ! ». Il était notamment question d’un modèle de lettre à adresser aux élus. Signée de la main d’un enfant qui se déplace à vélo, voire mieux, de tous ceux d’une classe ou d’un quartier, ce pourrait être un outil efficace pour faire bouger les édiles. Après tout, protéger la vie des plus jeunes lorsqu’ils empruntent la bicyclette et tout faire pour leur construire un avenir où la voiture est une alternative au vélo, et non l’inverse, voilà qui fait sens.

  • Publié le 28 décembre 2023

En banlieue parisienne, ce quadra père de 2 enfants pratique le vélo au quotidien de manière (assez) sportive, sur route et en dehors. A des envies de longues randonnées à la découverte de nouveaux paysages.

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