On a essayé le vélo en plastique et c’était nul
Le RCYL d’Igus et MTRL est un vélo en plastique qui – malheureusement – n’est pas fantastique. Si l’idée de départ nous a interpelés, nous avons vite compris que c’est tout sauf un bon vélo.
En bref :
- Le RCYL est un vélo majoritairement composé de plastique, en partie recyclé. Il pèse 17 kg, n’a qu’une vitesse et vaut 1250 €.
- Dubitatifs face à ce concept, nous n’avons pas résisté à l’enfourcher. L’expérience fut très décevante.
Sur la zone d’essai de l’Eurobike 2024, un drôle de vélo en plastique faisait tourner les têtes. Un concept audacieux proposé par la société Igus, un gros industriel allemand de l’industrie plastique qui s’est associé au néerlandais MTRL pour imaginer un vélo pas comme les autres.
Composé quasiment à 100 % de plastique (dont 50 % de matériau recyclé), ce vélo – baptisé RCYL – veut répondre à une logique de durabilité. Si, d’un point de vue écologique, un vélo réutilisant de la matière, composé d’un nombre restreint de pièces et exploitant un matériau à l’épreuve du temps peut avoir du sens, on a vite compris en montant sur sa selle que cela n’a aucun intérêt d’un point de vue cycle.
Lourd et flippant
En effet, ce vélo monovitesse est à la fois trop lourd (17 kg) et beaucoup trop souple pour être agréable à rouler. Tant et si bien que les premiers mots de Tanguy, hilare après l’avoir essayé, on été : « Mais c’est complètement éclaté au sol ! ».
Difficile de le contredire même en essayant de donner sa chance au produit. Il suffit, à la main, de chercher à tordre le cadre du vélo pour réussir à le déformer très facilement. La pression des pieds sur les manivelles laisse une impression de distorsion du pédalier à chaque coup de pédale. Le vélo est ridiculement difficile à emmener, absolument pas rassurant en courbe, dès que l’on prend de la vitesse ou quand on veut s’arrêter un peu franchement.
Les roues bâtons – elles aussi en plastique – tournent sur des moyeux à la capacité de roulement très (très) limitée. Jusqu’aux poignées, le vélo est décevant. Ses différentes pièces sonnent creux et le manque flagrant de rigidité du RCYL est rédhibitoire.
Une version électrique, vraiment ?
La marque a beau essayer de nous rassurer en nous disant qu’il s’agit d’un prototype qui sera amélioré à l’avenir, elle finit en réalité par beaucoup nous inquiéter en nous annonçant qu’une version électrique du RCYL est prévue. On ne voit pas bien comment un tel vélo pourrait supporter correctement les fortes contraintes d’un moteur électrique, qui pour le coup n’a aucune chance d’être un composant en plastique recyclé.
Bref, sans vouloir porter la poisse à Igus, on prédit un avenir compliqué au projet RCYL qui aura quand même eu le mérite de nous amuser quelques instants entre deux essais beaucoup plus sérieux et intéressants sur cet Eurobike. On gardait la meilleure blague pour la fin : le vélo va être vendu 1250 €.
Si vous voulez voir un vrai vélo en thermoplastique, allez plutôt lire notre présentation du Matra i-Force Shock LT.
Droit de réponse de la société Igus
Vous avez essayé le vélo en plastique recyclé RCYL – composé à 92% de plastique, à l’exception des freins et de quelques connecteurs – d’Igus et MTRL sur le salon Eurobike et vous l’avez fortement critiqué : pas assez rigide, trop lourd, trop cher.
Je vous donne raison.
En même temps, je voudrais vous donner trois raisons pour lesquelles nous continuons, et vous expliquer pourquoi ce sera un bon achat pour les premiers clients pionniers.
Premièrement, avec ce vélo, nous commençons à offrir à l’industrie du vélo du monde entier une option pour la construction de vélos : non lubrifiés, non corrosifs, livrés rapidement à partir d’usines de sous-traitance locales en Europe, en Asie et aux États-Unis et véritablement durables.
Le cadre n’est pas encore parfaitement rigide parce que nous utilisons des plastiques ménagers et des déchets marins comme les vieux filets de pêche. Chez Igus, nous ne travaillons normalement que des plastiques de haute technologie, y compris avec des fibres de carbone, utilisées dans l’aérospatiale et la Formule 1. Mais les plastiques ménagers, les déchets d’emballage et les filets de pêche déchirés sont le grand problème en matière de déchets dans le monde.
En Europe actuellement seuls 40% des déchets plastiques sont recyclés, le reste est incinéré ou stocké dans des décharges. Nous en faisons des produits de mobilité précieux. Et nous prévoyons de produire des vélos inoxydables dans tous les grands pays du monde à partir de leurs déchets.
Et recycler encore et encore, c’est aussi cela, RCYL.
Deuxièmement, même si les sensations de conduite du RCYL bike ne sont pas encore parfaites : lors des salons Eurobike (Francfort) et Cycling World (Düsseldorf, en mars), environ 600 clients ont fait des essais. 232 clients ont rédigé un rapport de conduite et parmi eux, 120 ont donné une évaluation positive de la tenue de route, 180 une évaluation positive du design et tous une évaluation positive du degré d’innovation.
Je conduis moi-même le dernier modèle et je suis fier de ce que nous avons créé au cours des trois dernières années. C’est le premier vélo au monde construit à partir de plastique recyclé à 50% qui roule et qui ne rouille pas.
Troisièmement, presque toutes les grandes innovations commencent par des compromis. La première voiture de Tesla a été critiquée de la même manière que notre vélo, car la nouvelle technologie des packs de batteries et la nouvelle électronique ont été intégrées dans le châssis d’une Lotus Elise.
Là aussi, il y avait de nombreux réfractaires qui ne croyaient pas à la technologie des batteries lithium-ion dans une voiture. Mais Tesla a prouvé que la technologie de base fonctionnait. RCYL prouve qu’il est possible de construire un bon vélo adapté à la ville à partir de vieux déchets plastiques inutiles, avec un design primé, et tout ce qui bouge sans lubrification ni corrosion.
Aujourd’hui, les premières voitures Tesla sont des objets de collection et valent encore exactement ce qu’elles ont coûté à l’époque (quelques 120 000 €). Les clients RCYL d’aujourd’hui font avancer la technologie et acquerront une valeur. Et s’ils changent d’avis : nous recyclons leur vélo et en faisons un nouveau, la prochaine génération. RCYL, tout simplement.
Les cadres en polymère haute performance très rigides, moulés par injection font également partie de notre savoir-faire technologique. Pour la société Advanced e-bikes, nous avons pu développer le tout nouveau cadre Urban Reco, le tester dans nos laboratoires et le produire en série. Nous travaillons actuellement sur de nombreux projets de ce type, mais nous continuons à suivre la voie du cadre RCYL : des outils moins chers, des machines plus petites, une bonne solution pour les petites et moyennes séries à un prix raisonnable et surtout : construire de bons vélos à partir de déchets ménagers.
Merci pour votre retour ! Cela nous pousse à aller de l’avant !
Frank Blase
Entrepreneur et fondateur de RCYL
- Mis à jour le 15 octobre 2024